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Introduction…

Pendant les premières semaines pour certains, durant les premiers mois pour d’autres, les entrainements sont souvent déstabilisant lorsqu’on débute en Aïkido. En effet, le but du “jeu”, le principe de non-résistance, la manière de considérer l’autre, l’absolue non-violence pourtant pratiquer au moyen d’armes (sabre, bâton, poignard) perturbe assurément le novice.

Un sport de combat non-violent, pacifique… ce paradoxe séduit mais déstabilise immanquablement. Pratiquer un art martial consiste, de toute évidence, à placer deux personnes en rivalité; et “que le meilleur gagne” (ou tout au moins reste en vie et indemne). L’enjeu sera, à priori, de remporter la victoire, un trophée, enlever symboliquement ou réellement la vie à l’autre en conservant toute notre propre intégrité. Et “l’autre”, le perdant, quelque part: on s’en moque !!!

Ici, dans la “Voie de l’Harmonie des Energies“, même si réellement ou symboliquement il est question de neutraliser les intentions belliqueuses de l’adversaire réel ou potentiel, le procésus et la finalité sera tout autre.

On nous aura, durant notre jeunesse, toujours et systématiquement inculqué, que ce soit à l’école ou tout prés de nous à la maison, deux façons de répondre à la violence: y répondre par les mêmes moyens, bien souvent par la force, qu’il va falloir se battre pour gagner, ou bien, certaines religions le proposent: à la réception d’une gifle il faudra “tendre l’autre joue…”.

Notre inconscient personnel ou collectif s’attend à ne devoir faire que ce choix binaire face à une quelconque attaque. Et ce processus va se retrouver autant sur un ring, certains tatamis, dans la rue, sur la route, à la maison, et même en stratégies boursières, dans les entreprises, la justice, en diplomatie etc… Partout où il y aura confrontation, rivalité, concurrence, conflit, affrontement…

La vraie originalité d’O senseï Morihei Ueshiba en créant l’Aïkido, aura été de proposer une autre solution, une autre Voie. Le principe est d’une extrême simplicité en fait. Sa logique se retrouve dans la Nature. Elle peut s’illustrer par la fable du chêne et du roseau. Face à une poussée, au lieu de résister, de lutter, de tenter de s’imposer par la force, on ira tout naturellement avec elle… pour mieux la rediriger par la suite. En extrapolant, tout acte de violence, d’agressivité, de spéculation sur soi sera la source d’énergie principale à détecter au préalable. On se servira alors d’elle pour conduire le différend, l’envoyer sur un autre chemin ou bien vers le néant… L’Aïkido est de ce fait, une réponse inattendue. Elle peut être considérée comme originale, inovente, déstabilisante (c’est sa stratégie principale au sens propre comme au figuré). Elle reproduit pourtant les phénomènes les plus fréquents, démontrés et vérifiables autours de nous dans la Nature.

Les philosophies asiatiques se servent très souvent d’exemples puisés dans la Nature et ses phénomènes pour expliquer leurs principes. A quoi sert-il de chercher sans cesse à être le plus fort, le plus riche, le plus beau lorsqu’on sait qu’ immanquablement, la vieillesse puis la mort nous emporteront ? Un tsunami ou un déluge (de l’eau), un tremblement de terre (une vibration), une tempête (du vent), un incendie (le feu) auront raison des plus solides constructions…, Le temps aura toujours le dernier mot sur toute chose, de tout phénomène…, la rivière, l’eau a raison de la montagne, de la roche…

La pire des choses en Aikido serait de verrouiller, bloquer, repousser, lutter contre, rivaliser. Cela demande un énorme travail sur soi et tout d’abord sur ses idées préconçues, acquises durant l’enfance autours de toute idée mettant en jeu le conflit. Ensuite sur son corps qui a une tendance-réflexe à se raidir, en haussant les épaules, bloquer la respiration, tendre les muscles, congestionner les zones de ripostes (à commencer par le crâne, siège de la pensée) afin de se préparer à l’affrontement.

Considérer une attaque comme un déséquilibre chez l’autre, voir toute forme d’agression comme une source d’énergie, traduire la moindre velléité d’attaque comme un mal être chez l’autre qui implore de l’aide ou tout au moins de retrouver l’équilibre et le calme… Voila autant de pistes à explorer muni, au préalable, de la maîtrise de quelques techniques. A commencer par l’art des déplacements et esquives afin de ne jamais bloquer, verrouiller, stopper le flux, le Ki, Energie… et par conséquent reproduire, surenchérir ou tout simplement valider toute idée de violence.

L’entrainement quotidien d’un Aïkidoka consiste à, outre, acquérir de nouvelles techniques, travailler sur son corps afin qu’il sache s’adapter, se profiler, tendre systématiquement vers une meilleure et systématique fluidité. Pour y parvenir, il devra prendre conscience de toutes les tensions inutiles, mouvements réflexes parasites, des parties de son corps pouvant encombrer le passage de l’énergie fusionnée entre Uke et Tori…

Face au torrent, Tori devra se considérer non pas comme un barrage en béton, mais comme de possibles ruisseaux, canaux construits intelligemment, stratégiquement afin que l’eau puisse s’écouler naturellement, logiquement, harmonieusement.

Maître Ueshiba aura été communément décrit comme un visionnaire. Selon les textes sur O senseï, celui ci avait souvent cette réflexion: l’Aïkido est une voie pour réconcilier les Hommes entr’eux, et avec la Nature… Sa vision aura été le fruit d’un entrainement quotidien et d’un engagement philosophique et spirituel engagé.

Peut-être aura t il été une personne ayant tout simplement compris que nous nous étions inventé des concepts exclusivement humains (guerres, divorces conflictuels, spéculation sur l’autre, exécutions capitales “légales”, vengeance ….). Autant de principes inexistants dans la Nature et que l’Aïkido apporterait alors un moyen de se rapprocher de cette dernière, d’abord par la technique, ensuite par l’influence que celle-ci à la longue et à force d’entrainement, aura eu sur nous…

L’aïkido proposerait alors, face à toute forme de rivalité, une autre Voie…

PB